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- Rôle et influence de l’Église dans la traite et l’esclavage
Aucune parole divine ne condamnant l’esclavage dans la Bible, le christianisme ne l’interdira pas et aura une attitude longtemps équivoque vis à vis de l’esclavage. Pour tirer profit de la traite, ses papes autoriseront puis approuveront l’esclavage par les Portugais, et sous couvert de la légende de Cham, ils condamneront l’esclavage des Indiens d’Amérique mais accepteront celui des noirs. Ce n’est que progressivement que la condamnation de l’esclavage apparaît dans l’église catholique, complice et bénéficiaire du système, mais elle se limite, le plus souvent, à une condamnation de la traite. |
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A
l’origine, un oubli important
Dans
l’Ancien et le Nouveau Testament l’esclavage apparaît comme une
pratique naturelle et légitime. Aussi, lors de l’élaboration de la
doctrine chrétienne par Paul, le terme d’esclavage n’apparaît pas
parce que la soumission à Dieu s’applique à tous les êtres humains.
Comme aucune parole divine ne la condamnera, la servitude humaine
subsistera. Avec
le Moyen Age apparaît le servage et l'esclavagisme disparaît peu à
peu en occident mais la possession et la traite des esclaves non-chrétiens,
même dans les États pontificaux, n'est toujours pas condamnée. Mais
le pire est à venir.
L’alliance
du Portugal et de l’Eglise En
1435, alors que les Espagnols se battent avec les Portugais pour la
possession des îles Canaries et exploitent leur population, la bulle Sicut-Dudum
du pape Eugène IV condamne l’esclavage des habitants noirs, sous
peine d’excommunication, mais en Espagne, à cette époque,
l’autorité du pape est peu reconnue et la bulle reste sans effet. A partir de 1441, tout change lorsque les Portugais mènent leurs expéditions maritimes et militaires le long des côtes d’Afrique et capturent les premiers esclaves. Ce premier acte négrier est à l’origine de la traite atlantique (ou occidentale). Des esclaves seront offerts au même pape Eugène IV, qui, à partir de cette époque, va entériner les conquêtes portugaises en Afrique et notamment celles du prince Henri le navigateur, prince du Portugal et précurseur de l’expansion coloniale européenne. Aux yeux des portugais, ces expéditions se justifiaient pour des raisons commerciales et pour contenir l’expansion de l’islam. . |
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Calixte III | De Las Casas | Henri le Navigateur | Paul III |
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Quand
l’Eglise œuvre pour tirer profit de la traite. Par
une série de bulles, le pape Eugène IV et ses successeurs (Nicolas V,
Calixte III et Sixte IV) approuveront les expéditions portugaises, y
voyant l’occasion de convertir au christianisme toutes ces populations
de païens et Sarrasins incroyants. En échange de la soumission des
populations, l’Eglise accordera le monopole commercial de l’Afrique
au roi du Portugal, Alphonse V. Ces bulles prendront soin de préciser
que ces soumissions salutaires pouvaient passer par l’asservissement,
voire par une réduction en esclavage des « nègres de Guinée »
et qu’elles devaient être confiées à l’Ordre du Christ, la confrérie
d’Henri le navigateur. En plus de ces bulles, l’église chrétienne,
par son pape Alexandre VI, organise le partage du monde entre le
Portugal et l’Espagne avec le Traité de Tordesillas en 1494. La
prise de position de l’église catholique en faveur de la traite ne
sera pas un épiphénomène. Trop contente de disposer de nouveaux
territoires d’évangélisation forcée, celle-ci encouragera
l’esclavagisme tout au long de la période de la traite négrière.
Des
bulles, des bulles … Voici
les noms de quelques bulles célèbres (avec les dates et les papes qui
s’y rattachent). .
Le
débat sur l’esclavage des Indiens d’Amérique . |
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Noé, Cham et ses frères | Esclave indien et conquistadors | Esclaves et missionnaire |
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La
légende de Cham ou la justification de l’injustifiable esclavage .
Du
XVI au XIX° siècle, des arguments idéologiques contre
l'abolition . |
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D’une
manière générale, de Saint Augustin, en passant par Saint Thomas et
jusqu’à Grégoire XVI (pape en 1839), la théorie de l’esclavage de
Saint Paul et la légende de Cham restera la doctrine officielle de l’Église
catholique romaine. (Suite...) |